■— Il N’y A Pas De Sensation Plus Délicieuse Que Celle Que Procure La Conscience. Préféreriez-Vous Vivre Dans L’obscurité ? Préféreriez-Vous Agir Et N’être Pas Conscient De Vos Actes, Parler Et N’être Pas Conscient De Vos Paroles ? Préféreriez-Vous Écouter Sans Comprendre Ce Qu’on Vous Dit, Ou Voir Des Choses Sans Être Conscient De Ce Que Vous Regardez ?
― Le Grand Socrate Disait : « Une Vie Sans Conscience Ne Vaut Pas La Peine D’être Vécue. » C’est Une Vérité Absolue.
La plupart des gens ne vivent pas une vie consciente. Ils vivent une vie machinale, ont des pensées machinales — généralement celles des autres —, des émotions machinales, des réactions machinales, et ils agissent machinalement.
Voulez-vous voir à quel point vous agissez machinalement ?
« Oh, quelle belle chemise vous portez ! » Comme vous êtes satisfait d'entendre cela. Mais il ne s'agit que d'une chemise, pour l'amour du ciel ! Mais non, vous êtes fier lorsque vous entendez cela.
Les gens qui me rendent visite à mon Centre en Inde me disent :
« Quel endroit merveilleux ! Quels arbres magnifiques ! » Si cet endroit est merveilleux et les arbres magnifiques, je n'y suis certainement pour rien.
« Quel climat extraordinaire » ! Et voilà que je me sens bien, jusqu'à ce que je me surprenne à me sentir bien, alors je me dis : Comment peux-tu être aussi stupide ? Je n'ai rien à voir dans la beauté de ces arbres ; ce n'est pas moi qui ai choisi l'endroit où se trouve le Centre. Je n'ai pas commandé au temps ; s'il fait beau, je n'y suis pour rien.
Mais voilà, « Moi » est entré dans tout cela et Je me sens bien. Je me sens bien à propos de « Ma » culture et de « Mon » pays. Comme on peut être stupide ! Je n'exagère pas.
On me dit que la grande culture indienne a produit un grand nombre de mystiques. Je ne les ai pas produits. Je ne suis pour rien dans leur existence. Ou alors on me dit : « Votre pays est si pauvre — c'est dégoûtant ! » Alors j'ai honte. Mais je n'ai pas créé cette pauvreté.
■― Que Se Passe-T-Il ? Pourquoi Ne Prenons-Nous Pas Le Temps De Réfléchir ?
Les gens me disent : « Je vous trouve charmant », et je me sens merveilleusement bien ; j'ai reçu une petite tape positive (c'est pour cela qu'on utilise l'expression « Tu es O.K., je suis O.K. »).
Un jour j'écrirai un livre que j'intitulerai Je suis un âne, tu es un âne. C'est là une des choses les plus libératrices, les plus extraordinaires qui soient au monde : admettre que l'on est un âne.
C'est merveilleux. Lorsque des gens me disent : « Vous avez tort », je réponds : « Espériez-vous autre chose d'un âne ? »
― Désarmé, Chacun Doit Être Désarmé.
Lors du désarmement final, il ne reste plus que des ânes : je suis un âne, tu es un âne. Pour l'instant, les choses se passent ainsi : je presse un bouton et vous êtes content ; j'en presse un autre et vous êtes déprimé. Et vous aimez cela.
Combien de personnes connaissez-vous, dans votre entourage, qui ne sont pas atteintes par la louange ou le blâme ?
C'est humain, dites-vous. Être humain veut dire se comporter comme un petit singe et permettre aux autres de vous tirer la queue, et ensuite ce que l'on est censé faire. Mais cela est-il vraiment humain ?
Si vous me trouvez charmant, cela veut tout simplement dire que vous êtes dans une bonne disposition d'esprit, rien de plus.
Cela veut également dire que je réponds affirmativement à vos critères.
Nous nous promenons avec une liste de critères, et il semble que nous mesurions tout selon cette liste — grand, oui..., élégant, selon mes goûts à moi. « J'aime le son de sa voix. »
Vous dites : « Je suis amoureux. » Vous n'êtes pas amoureux, âne stupide !
Chaque fois que vous êtes amoureux — j'hésite à vous dire cela — vous êtes particulièrement idiot.
— Extrait De « Quand La Conscience S’éveille »
■ Anthony de Mello (1931-1987) —