Lumière byzantine sur la Côte d'Azur
VÉNÉRATION — L'iconostase, rapportée de Russie, impressionne les visiteurs et touche les fidèles.
仝 Chef-d'œuvre orthodoxe au cœur de la Riviera, la cathédrale Saint-Nicolas mêle spiritualité russe et raffinement méditerranéen
À quelques pas du cœur vibrant de Nice, entre palmiers et pins parasols, s'élève un monument inattendu. Couronnée de dômes vert-turquoise et de mosaïques éclatantes, la cathédrale Saint-Nicolas se dresse comme un éclat sur la Méditerranée.
Edifiée en 1912, elle est aujourd'hui la plus vaste cathédrale orthodoxe d'Europe occidentale - un témoin majestueux du lien ancien entre la Russie impériale et la Riviera française.
Son histoire remonte à la fin du XIXe siècle, époque où la famille impériale et l'aristocratie russe choisissent la Côte d'Azur pour y passer les hivers. Dès 1859, une première église orthodoxe fut inaugurée à Nice avec le soutien de la tsarine Alexandra Feodorovna. Ce fut la première église russe d'Europe occidentale, symbole d'une foi enracinée et vivante. Mais à mesure que la communauté grandissait, une cathédrale plus vaste s'imposa.
La cathédrale Saint-Nicolas de Nice a été construite en mémoire du tsarévitch Nicolas Alexandrovitch, fils aîné de l'empereur Alexandre II, décédé tragiquement à l'âge de 21 ans en avril 1865, à la villa Bermond de Nice. Sa disparition fut une perte immense pour l'ensemble de la Russie. L'empereur Alexandre II fit alors l'acquisition de la propriété, et y fit ériger une chapelle dédiée à saint Nicolas en 1867, consacrée l'année suivante.
À la fin du XIXe siècle, face à l'essor de la communauté russe à Nice, le besoin d'un édifice plus vaste se fit sentir. À la demande des fidèles et toujours en mémoire du tsarévitch, la construction de la cathédrale fut placée sous le haut patronage de l'impératrice douairière Maria Feodorovna.
La pose de la première pierre eut lieu en 1903 et la consécration en 1912.
Le projet fut confié à l'architecte Mikhaïl Préobrajensky, qui s'inspira des églises à cinq coupoles de Moscou. Le chantier mobilisa plus de 1,5 million de francs-or, dont 700.000 furent donnés par l'empereur Nicolas II lui-même. Parmi les autres mécènes figureraient le prince S. M. Golitsyne, les Elisseïev et la comtesse Apraxine.
≈ L'architecture comme langage spirituel
Plus qu'un simple décor, l'architecture de la cathédrale Saint-Nicolas porte en elle une symbolique profonde. Les cinq dômes à bulbes, orientés vers le ciel, rappellent la présence divine et l'élévation de l'âme. Le dôme central représente le Christ, tandis que les quatre dômes secondaires symbolisent les évangélistes - un schéma traditionnel dans l'architecture orthodoxe.
L'orientation liturgique de l'église vers l'est évoque la lumière du Christ ressuscité, et les éléments décoratifs, tels que les fresques et les icônes disposées en hauteur, sont pensés pour guider le regard vers le céleste. Ainsi, chaque détail architectural participe d'une théologie de la beauté : celle qui rend le mystère visible et transforme la pierre en prière.
≈ Un chœur vibrant de couleurs et de symboles
À l'intérieur, la cathédrale surprend par sa clarté. Six voûtes en forme de dôme reposent sur une structure en béton, conférant à l'ensemble une sensation d'élévation et de lumière. Les voûtes et les colonnes, peintes en bleu, jaune et violet, sont décorées de frises florales douces, nous faisant entrer dans une atmosphère lumineuse et apaisée.
TRADITION — Les coupoles se dressent dans le ciel niçois, dans le plus pur style des églises russes.
L'attention se porte rapidement vers l'iconostase : une cloison en bois sculpté, rapportée de Russie, qui sépare le sanctuaire du chœur. Finement dorée et ornée d'icônes majestueuses, elle incarne tout le raffinement de l'art religieux orthodoxe. Parmi ces représentations, l'icône de Notre-Dame de Kazan, particulièrement vénérée en Russie, retient le regard.
Aujourd'hui encore, la cathédrale conserve une icône miraculeuse de Saint-Nicolas le Thaumaturge, ayant appartenu au tsarévitch et vénérée comme l'un des trésors spirituels du lieu.
Fresques, chandeliers et icônes anciennes dialoguent dans cette nef silencieuse, où chaque détail révèle un soin liturgique minutieux. L'église, toujours en activité, accueille régulièrement des offices selon le rite orthodoxe slavon, ainsi que des célébrations en français lors des grandes fêtes liturgiques. Elle rassemble fidèles russes, serbes, moldaves, mais aussi Niçois et visiteurs de passage.
La cathédrale est à la fois un lieu de culte, un repère identitaire et un centre spirituel vivant au cœur de la Côte d'Azur.
≈ Un repère silencieux
Bien au-delà de son importance religieuse, la cathédrale Saint-Nicolas est aussi un joyau du patrimoine niçois. Elle a été classée monument historique en 1987, puis labellisée «Patrimoine du XXe siècle». Son emplacement, au bout de l'avenue Nicolas-II, près du boulevard du Tzaréwitch, témoigne encore de cette époque où Nice rayonnait comme carrefour des cultures.
Aujourd'hui, elle se dresse comme un repère silencieux dans la ville, un havre de paix où résonne encore l'écho des liturgies byzantines. Dressée comme un phare de la foi chrétienne, la cathédrale de Nice nous rappelle la puissance du sacré, la beauté d'un art enraciné, et les liens durables entre les peuples.
(1) — Auteur : Journaliste, Xenia Fedorova est chroniqueuse sur CNews et anime «Lumières orthodoxes» sur Canal+.
— Mercredi 30 juillet 2025
— Source documentaire : Le JDnews
—■ Xenia Fedorova (1) —