Bombay se dispute autour des pigeons entre foi, culture et santé publique en tension. —Martijn Vonk via Unsplash
🏝️ Les Pigeons De Bombay Sont En Train De Déclencher Une Véritable Crise Politique Et Religieuse
🈶 L’interdiction de nourrir les pigeons a provoqué manifestations, affrontements et tensions religieuses dans la mégapole indienne. Ce qui n’était qu’une mesure sanitaire cristallise aujourd’hui une vraie fracture de société.
• À Bombay, de simples poignées de graines destinées aux oiseaux sont à l’origine d’une crise majeure qui fait parler dans tout le pays. La fermeture de dizaines de points de nourrissage — appelés kabutarkhanas — où les pigeons se rassemblent a déclenché des manifestations et des affrontements avec la police indienne.
• De grandes bâches disposées au sol par la municipalité ont été arrachées et des graines ont été répandues au sol en signe de protestation. Dans la ville la plus peuplée du pays, la scène urbaine la plus banale qui soit est devenue un enjeu sociétal. Surtout quand cette affaire prend une ampleur nationale, portée par des acteurs religieux et des partis politiques.
• Selon un article du New York Times, les restrictions décidées par le gouvernement de l’État du Maharashtra, mené par le Bharatiya Janata Party (BJP) — un parti d’extrême droite nationaliste hindou —, découlent des potentiels risques sanitaires liés aux plumes et aux fientes des pigeons. Cette nouvelle mesure a presque immédiatement suscité la colère d’associations de protection animale et d’une partie de la communauté jaïne, adepte d’une religion qui prône la non-violence envers tous les êtres vivants.
• Sur le terrain, la manifestation a rapidement pris de l’ampleur. Lors d’un rassemblement contre la fermeture d’un kabutarkhana, des militants ont affronté les autorités locales. Le moine jaïn Muni Nilesh Chandra Maharaj a menacé de se lancer dans une grève de la faim illimitée si les restrictions n’étaient pas levées : « Notre religion dit qu’il est permis de prendre les armes pour protéger la religion. Notre grève de la faim sera cette arme. »
≈ Entre risque sanitaire et convictions religieuses
• Si la communauté Jaïne soutient autant la présence des kabutarkhanas, c’est parce qu’ils respectent minutieusement un principe de non-violence envers tout être vivant, très populaire dans les croyances bouddhistes et hindouistes de l’Asie du Sud-Est.
• Dhiraj Baldia est un expert en protection animale basé à Bombay qui travaille pour une organisation Jaïne luttant pour la protection des animaux. « Nourrir les êtres vivants fait partie des écritures, rappelle-t-il. Servir ceux qui n’ont pas de voix et nourrir les oiseaux également. » La tradition culturelle évoque même l’exemple de Shantinatha, maître spirituel censé avoir sauvé un dieu déguisé en pigeon en lui offrant sa propre chair.
• À l’inverse, Kishor Rithe, directeur de la Bombay Natural History Society une organisation de recherche environnementale, souligne la dangereuse flambée des populations de pigeons. Nourris en abondance, ils se multiplient, d’autant que la plupart de leurs prédateurs ont disparu : une régulation sanitaire s’impose.
• « Les fientes et les plumes de pigeons peuvent provoquer des infections fongiques ; l’exposition prolongée peut entraîner une maladie interstitielle pulmonaire, qui cicatrise les tissus et peut être fatale si elle n’est pas traitée », alerte, par exemple, Gopal Chand Khilnani, pneumologue à New Delhi. Dans la guerre des pigeons, il faudra choisir votre camp.
— Source documentaire : Slate France
— Vendredi 29 août 2025
—■ Anaëlle Phu —
