09 novembre 2025

≡ Mères Du Désert, Les Grandes Oubliées

Mères du désert Sainte Paule et sa fille Eustochium avec Saint-Jérôme — tableau de Francisco de Zurbarán



💒 A la différence de leurs homologues masculins, les anachorètes femmes sont peu connues. Pourquoi ? 



Les historiens avancent que les femmes, à cette époque, n’écrivaient guère, et publiaient encore moins leurs récits de vie. Par ailleurs, les grands témoins de la vie au désert, comme Jean Cassien, ont rapporté ce qu’ils ont observé auprès des moines, mais pas auprès des moniales. 


Par pudeur, ou par mépris de la femme ? 


C’est l’hypothèse que retient Margot H. King, l’auteure d’une des premières études sur la tradition anachorétique féminine depuis ses origines en Orient chrétien : 


« Le rejet des Mères du désert est lié sans doute à la crainte et à l’hostilité envers les femmes qu’on trouve souvent dans les écrits des Pères de l’Église et qui se reflètent parfois dans les vies des Pères du désert • » 


À défaut de pouvoir affirmer avec certitude si elles furent nombreuses ou pas, on sait que les unes vivaient en solitude au cœur du monde, d’autres seules dans le désert, d’autres encore dans un monastère. 


Leur ascèse n’en fut pas moins rude que celle des hommes. Certaines étaient recluses, telles, Thaïs. Les sœurs Numphodore.


Ils ont choisi la solitude Ménodore et Métrodore, enfermées dans un tumulus à Pythia. Quant à Marana et à Cyra, elles habitèrent enchaînées dans une petite enceinte à moitié à découvert. 



Amma Sarra, l’une des rares Mères du désert dont les sentences sont conservées parmi les apophtegmes (préceptes ou sentences ayant valeur de maximes) des Pères du désert, aurait, elle, pratiqué pour sa part, la « garde des yeux » sans discontinuer. 


— On rapporte qu’elle « demeura près du fleuve pendant soixante ans et ne détourna pas les yeux pour le regarder ».  


— Par cette ascèse du regard, considéré comme « la fenêtre de l’âme », elle en aurait imposé à de grands anachorètes. 



Connue, elle aussi à travers les apophtegmes des Pères, Amma Synclétique était issue d’une noble famille d’Alexandrie et elle distribua sa fortune aux pauvres avant de se retirer dans un tombeau. Son austérité et sa sainteté lui attirèrent des disciples qui vécurent au désert sous sa direction spirituelle. 



Quant à Marie l’Égyptienne (354-431), elle quitta ses parents à l’âge de 12 ans pour fuir à Alexandrie. Là, elle se livra pendant dix-sept ans à la prostitution, avant de se convertir sous une icône de la Vierge Marie. Elle aurait vécu quarante-sept ans dans le désert près du Jourdain. 



La spiritualité des Mères du désert, telle qu’elle est connue à travers leurs (rares) propos, ne se distingue pas de celle des Pères du désert, sinon par une insistance particulière sur l’humilité. Humilité qui peut conduire jusqu’à se réjouir face au mépris et à la calomnie des autres, et, à tout le moins, à bannir tout contentement de soi-même.




— 2 novembre 2025

— Source documentaire : Extrait du livre de Jean-Claude Noyé

« Ils Ont Choisi La Solitude » — Ermites d’hier et d’aujourd’hui




Aron O’Raney —