25 octobre 2020

Après l’Exode, Bribes…




Je pense au pays natal, à ma fratrie, et à ce qui reste aujourd’hui d’une famille au sein de laquelle, j’ai vécu les années innocentes de l’enfance et de l’adolescence insouciante.

Je repars souvent revisiter les scènes d’un heureux passé en terre d’origine, dans la ville radieuse d’Oran. 


Les dimanches et jours de fête, petits et grands, nous étions souvent onze personnes réunies autour de la table de la salle à manger, pour partager un repas maison amélioré. Il y avait là, mes parents, grand-mère, mon frère, et mes trois sœurs, accompagnées de leurs maris. Nous étions un peu à l’étroit, mais nul n’aurait songé à s’en plaindre, tant nous étions heureux d’être ensemble.


Dans la nostalgie qui me gagne peu à peu, je songe tristement à l’entourage familial, oncles et tantes, neveux et nièces, tous perdus de vue, quelque part sur d’autres rives, ou partis dans un autre monde, un meilleur ailleurs.


L’école primaire, la salle de classe, une cour de récréation, un chant, des visages connus, mon maître préféré. En voyageant un peu plus loin, le grand Lycée en centre ville, des amis, mon très cher professeur d’arabe.


L’été s’effiloche doucement, les jours raccourcissent, mais la chaleur est toujours présente et le spectacle de la rue permanent. 


Dans ma rue je revois mes camarades de jeux et d’aventures dont je distingue bien le visage, quelques voisines papotent à l’entrée d’un immeuble, le marchand d’eau douce passe en s’annonçant bruyamment. 


Dans la remontée des souvenirs, il y a ces personnes, proches et moins proches que j’ai côtoyé un temps dans ma vie.


Je dois remercier ceux qui ont partagé un temps d’existence avec moi, et ces autres qui n’ont fait que traverser ma route, sans oublier quelques êtres d’exception qui ont marqué ma vie.


Les souvenirs de mon pays m’apaisent un peu ici, où je vis sans envie.


Je suis là, et fidèle à ma nature, j’attends depuis longtemps. Je peux ajouter que cette attente s’est installée en moi, depuis mon arrivée en terre inhospitalière. 


Cela fait donc plus d’un demi-siècle que j’attends, mais aussi étrange ou stupide que cela paraisse, je ne saurais dire quel est l’objet de cette attente. Sans doute cela relève-t-il du domaine du rêve, de l’inconnaissable ou d’un sentiment tenace d’incomplétude.


Durant la majeure partie de l’existence, j’ai marché aveuglément, trébuchant sur les chemins, et de chutes en rechutes, j’ai toujours perdu la main. Il est vrai c’est certain, que la réussite ne m’a jamais accompagné, ni davantage sourit, depuis ma venue en terre d’ici.


Je me réveille la nuit, et demi conscient, dans le noir silence il me semble entendre le bruissement des vagues, et la respiration des eaux, qui me font naviguer sans gouvernail jusqu’à la rive, du pays perdu.


Je reconnais maintenant le chant du vent qui souffle dans la ramure des palmiers, et la rumeur hésitante et confuse d’une ville qui voudrait renaitre dans sa vie d’avant.


Le désespoir m’épargne encore, point de patrie pour moi, mais je sais aussi que la mer me précède et me suit. Les yeux secs je souffre sans doute, de l’exil forcé, mais peu m’importe, j’attends encore.



Le jour vient, enfin…




Aron O’Raney

Samedi 24 septembre 2020