21 octobre 2024

Espérance Et Désespoir

 



Serons-Nous Assez Forts Pour Continuer À Choisir La Vie, Quand Vivre Signifie Mener Perpétuellement Cette Lutte Absurde Entre L'être Et Le Néant, Au Fond De Notre Moi Le Plus Intime?


Les racines de la vie demeurent immortelles et invulnérables en nous si nous continuons à nous maintenir normalement vivants par l'espérance. 


Mais l'espérance, dans sa pleine dimension surnaturelle, est au-delà de notre pouvoir. 


Et lorsque nous essayons de maintenir l'espérance en nous par une obstination pure et violente à vouloir vivre, nous aboutissons, sinon au désespoir, à ce qui est pire : à l'illusion. 


Car en réalité une telle illusion est un désespoir qui refuse de se reconnaître pour ce qu'il est. 


C'est la forme pitoyable que les lâches donnent à leur désespoir.


Donc l'espérance est un don. Comme la vie, c'est un don de Dieu, total, gratuit, incompréhensible, immérité. 


Il jaillit du néant, complètement libre. Mais pour le trouver, nous devons descendre dans le néant.


C'est là que nous le rencontrons le plus parfaitement, quand nous sommes dépouillés de notre assurance, de notre force, et que nous n'existons presque plus.


« Une Espérance Que L'on Voit N'est Pas Une Espérance », dit Saint-Paul, par conséquent désespérez. 


Voir votre espérance. C’est l'abandonner.


L'espérance chrétienne « que l'on ne voit pas » est une communion à l'agonie du Christ. 


C'est l'identification de notre propre « Agonia » avec celle de Dieu qui S'est dépouillé et fait obéissant jusqu'à la mort.


C'est accepter de vivre au  milieu de la mort, non parce que nous avons le courage, la lumière ou la sagesse de le faire, 


Mais parce que, par miracle, le Dieu de Vie accepte de vivre, en nous, au moment même où nous nous enfonçons dans la mort.


Toute pensée véritablement religieuse prétend armer l'homme pour cette lutte avec la mort en lui donnant les moyens qui lui permettront d'assurer la victoire de la vie. 



— Extraits De "Le Nouvel Homme"




Thomas Merton (1915-1968) —