Un documentaire saisissant retrace la périlleuse mission d'exfiltration menée par la France en août 2021 pour échapper à la menace des talibans.
En août 2021, le monde entier a les yeux rivés sur l'aéroport de Kaboul.
Les caméras enregistrent en direct l'échec cinglant de la politique américaine et le basculement d'un pays vers la peur. Des milliers d'Afghans, dont la détermination traduisait le sentiment de panique, s'accrochaient aux avions prêts à décoller.
Ce chaos, le documentaire Opération Apagan, exfiltrer Kaboul l'illustre avec efficacité, faits précis et témoignages à la clef. Il s'attache plus précisément à retracer l'opération menée par la France pour exfiltrer les derniers membres de son ambassade, ainsi que des Afghans ayant œuvré pour l'Hexagone, des binationaux, des officiels ou des intellectuels menacés par le nouveau pouvoir. 2.800 personnes environ, dont 2600 Alghans.
Une mission périlleuse que cet Impeccable film réalisé par Bernard George retrace jour après jour.
« Pars maintenant. » C'est le message que récolte, mi-août, l'ambassadeur de France David Martinon de la part du délégué général de l'OTAN, alors que les Kabouliotes se ruent dans les banques et que les soldats afghans enlèvent en toute hâte leurs uniformes.
La capitale s'apprête à tomber aux mains des islamistes, à l'issue du départ des forces américaines et de la débâcle militaire de l'armée nationale, chapitres que le documentaire résume un peu rapidement. Il s'agit désormais de sécuriser, après plusieurs vagues de départ entre mai et juillet, l'exfiltration de ceux que la France protège.
◆ Situation inflammable
Le film, c'est là tout son intérêt, éclaire les difficiles processus de décision, les dilemmes qui ponctuent de telles opérations. Que faire lorsque des talibans tournent dangereusement autour d'Afghans massés devant les grilles de l'ambassade de France ? Les services de sécurité évoquent le risque qu'il y aurait à faire pénétrer ces civils dans le bâtiment. L'ambassadeur insiste sur le danger encouru à l'extérieur. Ils entreront, avant d'être dûment contrôlés.
Se pose ensuite la question du trajet vers l'aéroport.
Les talibans ont certes signé un accord de paix, s'engageant à sécuriser les retraits occidentaux, mais la situation reste incertaine. Et inflammable. « Je craignais que l'on tombe sur un tireur embusqué », détaille un major du Raid.
Les Américains proposent de mettre à disposition des blindés. « Très mauvaise option, qui sera vue comme une posture agressive », juge l'ambassadeur, qui préfère un convoi discret. Les Français approchent un dignitaire taliban qui les rassure sur la possibilité de traverser la ville. Cela n'empêchera pas d'autres hommes en armes d'arrêter les voitures un peu plus loin. Un interprète se souvient de la tension de ces moments-là.
La situation à l'aéroport donnera d'autres sueurs froides aux Français, qui découvrent un « chaos humain invraisemblable », pour citer un jeune militaire. Les conditions sanitaires y sont déplorables. Certains artistes à qui l'Hexagone a promis sa protection doivent traverser par leurs propres moyens la foule compacte.
L'attentat perpétré par l'État Islamique le 26 août à l'aéroport, dont les forces occidentales savaient hélas l'imminence, met fin aux opérations. Elles se poursuivront au mois de septembre. Aujourd'hui, de nombreuses demandes d'asile continuent d'être envoyées à la France.
Ce documentaire se clôt sur les regrets d'une artiste, qui fait le deuil de son pays et de sa vie d'avant. Dans le même temps passent les images d'un avion militaire quittant le ciel bleu de Kaboul. Elles laissent imaginer, hors champ, les milliers d'Afghans condamnés a vivre sous une administration cruelle, qui va jusqu'à interdire aux femmes d'étudier, de se promener dans un pare comme de chanter.
— « Opération Apagan, exfiltrer Kaboul »
— Une diffusion de la chaine M6
■ Benjamin Puech —