Que ne t'atteigne pas l'air, l'aurore, la nuit,
Mais seulement la terre,
Et la vertu des grappes,
Et la pomme qui pousse en entendant l'eau pure,
La résine et la boue de ta terre odorante.
Depuis Quinchamali, où tes yeux furent faits
Jusqu'à tes pieds
Créés pour moi sur la frontière
Tu es la glaise obscure et que je reconnais :
Tout le blé, je le touche
Á nouveau sur tes hanches.
Et peut-être l'ignorais-tu, mon araucane,
Lorsque avant de t'aimer
J’oubliai tes baisers
Qu'il me restait au cœur
Mémoire de ta bouche
Et j'allai par les rues
Pareil à un blessé
Pour comprendre à la fin
Que j'avais découvert
Mon territoire, amour, de baisers, de volcans.
— Extrait de « La Centaine d’Amour »
— Cent « sonnets de bois » écrits
—À son grand amour, sa dernière femme, Matilde Urrutia.
■— Pablo Neruda —