➤ La liberté est une autre vertu à laquelle le vieil homme doit s’exercer.
Bien souvent, il y accède plus aisément que lorsqu’il travaillait.
Il peut exprimer ses opinions et ses sentiments sans tenir compte de ce que pensent ou attendent les autres, car il ne dépend plus du jugement d’autrui et n’a plus rien à prouver.
De cette indépendance découle une plus grande liberté.
Si les discours et les livres de personnes âgées sont souvent si précieux, c’est parce que ces dernières « peuvent considérer l’existence avec plus de détachement.
Le lien qui les unit à elle étant moins affectif et exigeant, elles en perçoivent des aspects invisibles pour d’autres ».
Cependant, la liberté des gens âgés ne va pas de soi.
Nous savons que le contraire existe aussi, que certains vieux se figent et s’obstinent, disposition qui, s’accentue avec le temps.
Afin de ne pas succomber à l’entêtement, il convient de s’entraîner à être libre.
En se détachant des attentes d’autrui, le vieil homme emprunte le chemin de la liberté, celui qui conduit à l’indépendance d’âme, à la sérénité et au bonheur.
—Ne devant plus rien prouver, pas même sa vigueur, à qui que ce soit, il s’autorise à être tel qu’il est.
J’ai observé cette liberté dans le cercle des séniors que dirigeait ma mère.
Les femmes pouvaient y raconter leur vie en toute honnêteté, sans devoir embellir le rôle qu’elles y avaient joué.
S’entretenir avec des personnes âgées libres d’esprit est une chose fort appréciable. Auprès d’elles, nous avons le sentiment de ne pas être jugés. Ne se souciant guère de morale ou de légalité, elles pensent plus librement qu’un grand nombre de jeunes.
Elles n’ont pas besoin de prouver qui elles sont ni de se mettre en avant ; elles sont tout simplement là, libres d’écouter l’autre sans le juger.
Elles examinent avec le cœur les révélations de ce dernier et tentent de les comprendre.
—Les personnes âgées n’en paraissent que plus affligeantes quand elles n’ont pas acquis cette liberté d’âme, ne parlent que d’elles-mêmes et sollicitent en permanence une oreille attentive.
En société, les vieillards libres d’esprit s’octroient la liberté de dénoncer les évolutions qui leur semblent néfastes.
Ne devant plus ménager ni alliés politiques ni supérieurs hiérarchiques, ils s’expriment sans ambages.
Leur libre pensée profite à la société tout entière, car elle sème, dans le cœur de ceux qui doivent satisfaire les attentes de leur entourage, une graine de liberté.
L’Église a elle aussi besoin de vieillards qui s’expriment ouvertement, sans se soucier des jugements ou des dommages qu’entraîneront leurs propos.
—Les évêques Franz Kamphaus et Reinhold Stecher.
Leurs prédications venaient toujours du cœur, au prix, s’agissant de Franz Karnphaus, de l’Opposition de Rome et d’un grand nombre de ces pairs. Mais il ne pouvait faire autrement que suivre sa conscience, donnant par là même à beaucoup une lueur d’espoir. Il a créé un espace de liberté intellectuelle, invitant les autres à penser par eux-mêmes et à épancher leur âme.
—Anselm Grün,Le Moine Thérapeute
—Extrait de « L’art de bien vieillir »
—Albin Michel
—■ Anselm Grün –